
Elevée en Mayenne par des parents agriculteurs, la jeune Blandine se plaît à s’épuiser lors de parties de campagne interminables, loin de la foulée déchaînée. Les années défilent au rythme des moissons, bercées par cette symphonie pastorale.
La fin du lycée sonne pour de nombreux jeunes ruraux le début d’une transhumance vers les grandes villes fumantes et vrombissantes, exode éphémère espéré par leurs aînés. Loin de traîner les pieds, Blandine élargit son champ visuel et tourne le regard vers notre voisin germanique, dont elle voue une véritable passion depuis qu’elle est enfant. Un penchant confessé qui prête à sourire, la jeune fille ne pouvant l’expliquer ! L’étudiante entame alors des études franco-allemandes, décroche un master de Management dans une école de commerce à Reutlingen et à l’EM Strasbourg, se plaisant ainsi à enjamber le Rhin. Son diplôme en poche, Blandine retarde son retour en province, pose ses valises à Paris et débute une carrière dans le marketing de la mode et de la beauté. La jeune femme s’épanouit sous les toits parisiens de My Little Box. Une boîte beauté qui devient pour elle boîte à malice, qui renfermera et conservera des amitiés sincères qu’elle a noué
avec ses collègues. Les boîtes ont cette qualité d’être hermétiques, Blandine le sait. Alors, quand l’opportunité d’entrer à la Chambre franco-allemande de Commerce et de l’Industrie se présente, elle n’hésite pas une seconde, avec la double certitude que le lien étroit l’unissnt à ses nouvelles amies se resserrera. Chef de projets start-up. Le métier de ses rêves pense-t-elle alors, à accompagner de jeunes pousses à la lisière franco-germanique, à jongler entre les langues de Goethe et de Molière. Mais la réalité est tout autre et la désillusion est à la hauteur de l’espoir placé dans cette nouvelle expérience. Un nœud commence à serrer son ventre pour remonter jusqu’au cerveau, dans des allers-retours difficilement supportables. La jeune femme doit alors affronter l’évidence : si elle a cru un temps faire illusion en fille des villes rompue au béton urbain, elle est assurément une fille des blés, des racines à la pointe de ses mèches blondes.
Quand le quotidien s’assombrit, il est une attitude salvatrice, celle de repenser aux journées lumineuses antérieures. Blandine s’est réfugiée depuis quelques semaines déjà dans sa vie passée à l’heure allemande. Un souvenir ressurgi instantanément dans son présent : sa découverte du « beewrap », un emballage alimentaire composé de cire d’abeille. Loin de parasiter son esprit, cet ingénieux produit pollinise doucement les alvéoles de son cerveau, très emballé. Son enthousiasme, tombé en jachère, se remet à verdoyer et son abattement récent devient la mauvaise herbe à couper d’urgence. N’y tenant plus et voulant offrir à cette idée nouvelle la possibilité de germer, Blandine quitte son emploi en décembre et opère un retour à la terre.


2020 s’ouvre, traînant dans son sillage les inéluctables nouvelles résolutions, vœux pieux pour certains, mais qui s’apparentent cette année à une promesse, une injonction pour Blandine : une année ronde, dont le dernier chiffre l’encourage à repartir de zéro pour son aventure zéro-déchet. Des signes qui feraient sourire les plus cartésiens d’entre nous. Ceux-là même, loin de les discuter, pousseraient la logique, en rappelant que ce chiffre symbolise le devenir et l’infini. Car il est des batailles plus louables que d’autres. Celle de Blandine, la lutte contre les emballages plastiques à usage unique, l’est indéniablement.
La jeune femme se donne les moyens d’ouvrir le champ des possibles : elle dévore une formation de cinq semaines durant laquelle elle fait la connaissance d’entrepreneures très inspirantes, à l’image de Shanty Baehrel ou encore Elise Pringent. Ses cellules grises, telles des ouvrières disciplinées, entrent en action et lui permettent de poser rapidement les bases de son projet. Seedz : Blandine troque l’allemand pour l’anglais, garde le doublement de la voyelle du « bee » pour un jeu de mot avec « seed », ou « graine » en français, et ajoute la dernière lettre de l’alphabet pour offrir une consonance bourdonnante à ce nom. La jeune entrepreneure récolte rapidement le fruit de son labeur. Mis en pré-vente sur Ulule alors que la France commençait son confinement, ses beewraps ont fait mouche, avec plus de 1300 ventes au lieu des 100 espérées. Un joli coup de pied dans la toute petite fourmilière du zéro-déchet…

Crédit photos: Seedz. Un grand merci à Blandine pour sa gentillesse !